Extrait du bulletin de la Société Gorini (N°2) de Janvier 1904
On avait pu craindre il y a six mois que le nom de l’abbé Gorini fut oublié et que rien ne vint rappeler au grand public le centenaire de sa naissance. Aujourd'hui, cette crainte n'a plus de raison d'être; sans compter la fondation de la société qui porte son nom « monument vivant de notre admiration et de notre reconnaissance», sans parler de l'article, déjà signalé, à l'Université catholique. Il serait maintenant injuste de dire que le centenaire de Gorini est passé inaperçu. La paroisse de Saint-Denis-près-de-Bourg s'est mise en fête pour le célébrer à son tour.
Saint-Denis n'a point oublié celui qui, pendant douze années, fut son pasteur. Quand l'abbé Gorini quitta La Tranclière pour venir au milieu d'eux portant déjà au front l'auréole de la science, les habitants de cette chrétienne paroisse ne furent pas insensibles à l'honneur qui leur était fait. Mais, depuis la mort du savant curé, à mesure que le recul du temps permettait de mieux juger, et que la renommée de son savoir s'affermirait de jour en jour, l'estime grandissait en proportion. Les paroissiens de Saint-Denis comprennent ce qui rejaillit sur eux de gloire, pour avoir eu à leur tête un tel curé.
Une plaque mémoriale à l'entrée de l'église
Aussi, quand le curé actuel de la paroisse, M. Patel, parla de placer dans l'église un monument commémoratif, à l'occasion du centenaire, il rencontra l'accueil le plus sympathique. Il allait au-devant des désirs de tous et se faisait l'interpréte d'un sentiment unanime. Mais ce fut surtout dans le cœur des anciens, qui avaient connu M. Gorini, que la proposition trouva un écho favorable. Une souscription fut ouverte et la somme nécessaire bientôt réunie.
- Le curé, aussitôt, confia l'exécution du monument au sculpteur Doudeau, de Bourg. En quelques jours, tout était prêt et la plaque de marbre blanc était placée dans la nef de l'église de Saint-Denis, contre la muraille, entre les deux fenêtres de droite.
Cette plaque rectangulaire, large de 0,77m porte à la partie supérieure une espèce de fronton où se détache, en un petit médaillon circulaire, le buste de Gorini, en bas-relief. Au-dessous, deux palmes croisées, puis, occupant la plus grande partie de la surface, l'inscription suivante :
- Le curé de Saint-Denis avait fixé l'inauguration du monument au 10 janvier. Le choix était heureux. L'Eglise célébrait, on ce jour, la solennité de l'Epiphanie, où tout rappelle la manifestation de la lumière divine aux Nations. Gorini, après tant d'autres, et selon son pouvoir, avait contribué à faire briller cette lumière ; il était juste qu'une telle fête fut choisie pour manifester sa propre gloire aux yeux de tous.
A l'heure des vêpres, les cloches envoient dans les airs leurs joyeuses volées. Les fidèles remplissent l'église comme aux grands jours. Plusieurs prêtres du voisinage sont accourus pour prendre part à la cérémonie. L'un d'eux préside l'office. Un autre, après le magnificat, monte en chaire pour se faire l'interprète des sentiments de tous et pour tirer de la vie de l'abbé Gorini quelques leçons. Voici à peu près en quels termes son expression :
Mes frères :
" Invité par notre zélé pasteur à cette fête de famille, je devrais tout d'abord m'excuser d'y prendre la parole. Est-ce donc à moi de vous parler de M. Gorini Ne serait-ce pas plutôt à vous, nombreux encore dans cette enceinte, qui l'avez connu, aimé, admiré, à vous qui avez reçu de lui le baptême, la première communion, le pardon du ciel, de venir me dire quel était cet homme, la gloire de votre paroisse, de notre diocèse et de toute l'Eglise !
Mais non, comme il arrive à ceux qui aiment profondément, ce dont vous avez besoin, ce n'est pas de parler, c'est qu'on vienne traduire les sentiments de votre cœur. Vous voulez qu'une parole amie vous entretienne de celui que vous avez aimé et à qui vous gardez un si fidèle souvenir, vous voulez qu'on vous dise de lui ce que tout le monde en sait, ce que l'on vous a dit cent fois et ce que pourtant, vous entendez toujours avec un nouveau plaisir.
Me voici donc prêt à vous satisfaire, ou du moins, prêt à essayer de mon mieux de balbutier quelques mots d'éloge en l'honneur de votre ancien curé. Or, mes frères, sur les degrés de la grandeur morale, les hommes se distinguent par ce qu'ils ont aimé et c'est assez faire leur·éloge que dire de ces hommes : ils ont aimé tout ce qu'il y a eu au monde de plus beau et de plus grand. Tel fut M. Gorini dont la vie se résume en trois amours : l'amour de la famille, l'amour de la paroisse et l'amour de la science, choses si bonnes que meilleures ne pouvant être et qui remontent toutes au même principe, à l'amour de Dieu.
Ce que l'abbé Gorini a aimé tout d'abord, c'est la famille. La famille est comme le sanctuaire, se forment le cœur et les vertus de l'enfant. Le père lui communique cette fermeté, cette constance, cette énergie qui le rendront propre aux plus grands desseins ; la mère, cette douceur et cette tendresse qui le rendront sensible à l'infortune d'autrui et capable de toutes les affections qui ennoblissent la vie. Heureux les hommes qui ont trouvé dans leur famille des traditions d'honneur et de courage, de dévouement et de charité !
La pauvreté n'exclut pas la noblesse de l'âme
Ce fut précisément le cas de votre ancien curé. Il était fils de pauvres artisans. Mais la pauvreté n'exclut pas la noblesse de l'âme, la seule digne de respect et cette noblesse, Monsieur et Madame Gorini la transmirent, avec leur sang, au fils qui leur était né. Ils s'appliquèrent dans la suite à développer en lui cette disposition native. Mme Gorini, restée veuve de bonne heure, eut le rôle principal dans cette éducation et, chose digne de remarque, c'est à elle que nous devons non seulement le prêtre à l'excellent cœur, mais encore le savant dont nous sommes fiers.
Lorsque tout enfant, délicat et timide, Jean-Marie Sauveur, se vit mal compris et souvent rebuté pas ses maitres, il faillit se décourager. Savez-vous où il puisa le courage nécessaire pour se relever ? Dans le cœur de sa mère. Par affection pour elle, pour lui faire plaisir, il promit de travailler et garda, toute sa vie, cette virile résolution. Ce que l'esprit de plusieurs pédagogues n'aurait pu faire, pour la science et pour l'Eglise, le cœur d'une femme ignorante avait fait la preuve péremptoire de l'influence du milieu familial.
Aussi, cette famille à laquelle il devait tant, comme M. Gorini l'entourait de son affection ! Lorsqu'après une disgrâce, qu'on peut qualifier de providentielle, il fut nommé curé de La Tranclière, et qu'il se vit seul dans son pauvre presbytère, à la lisière des grands bois, il fut pris d'une sorte d'épouvante. « Ah ! s'écria-t-il, en tendant vers les siens des bras suppliants, vous viendrez, n'est-ce pas ? Vous ne me laisserez pas longtemps seul : vous viendrez tous les dimanches, et moi, de mon côté, au milieu de la semaine, le mercredi, j'irai vous voir.
L'invitation fut acceptée et, à partir de ce moment, chaque dimanche, la famille Gorini se trouvait réunie sous l'humble toit du curé de La Tranclière tandis que lui, chaque mercredi, prenait le chemin de Bourg dans le but sans doute de pourvoir à ses incessantes lectures, mais aussi afin de se trouver, quelques heures, au milieu des siens.
Ainsi, deux fois par semaine, la famille se reformait et, dans cette intimité où il pouvait donner un libre essor à son cœur et recevoir d'affectueux encouragements, M. Gorini puisait la force dont il avait besoin pour vivre dans la solitude et y poursuivre son labeur acharné.
Ce spectacle dont les paysans de La Tranclière furent pendant dix-neuf ans, les témoins édifiés devint plus touchant encore, lorsque l’abbé Gorini quitta son désert pour venir s’installer parmi vous.
Beaucoup de ceux qui m’entendent ne peuvent se rappeler sans attendrissement, l’attachement vraiment extraordinaire qui unissait les membres de cette famille. Maintenant la distance à franchir n’est plus que de deux kilomètres et peut être sera-t-il possible de se voir tous les jours ? Eh bien ! Désormais, ce sera tous les jours que la distance sera franchie.
Vers midi, le bon curé viendra s'asseoir à la table de famille, entre son frère, sa belle-sœur et ses nièces ; le soir, la maisonnée de Bourg se transportera tout entière à Saint-Denis, pour y souper et y passer la nuit.
Après le frugal repas, on se rendait dans le verger ou bien l'on se rangeait autour du foyer, suivant la saison, et les heures s'envolaient au milieu des plus intéressantes causeries et des plus doux épanchements. « Les gens de Saint Denis, dit le chanoine Martin, étaient touchés de ce spectacle d’amitié délicate, qui, chaque jour, se renouvelait sans lassitude, sous leurs yeux ; ils disaient dans leur naïf langage : on a jamais vu de bonnes créatures du bon Dieu s'aimer de cette sorte. »
Il en alla ainsi tous les jours, jusqu'à ce que l'épuisement prématuré de ses forces obligeât M. Gorini à résigner sa cure. Alors ce fut au milieu des siens qu'il se retira, ce fut au milieu des siens qu'il voulut mourir, laissant à tous un grand exemple d'amour de la famille.
Cet exemple, mes frères, suivez-le. Je vous adresse ce conseil avec d'autant plus d'instance que, de nos jours, l'institution sacrée de la famille est menacée. Des hommes qui, semble-t-il, ont pris à tâche de détruire tout ce que l'humanité a de grand, sont partis en guerre contre la famille. Ils proclament que l'enfant n'est pas à ses parents, mais qu'il appartient à l'Etat, au bien duquel tout doit être sacrifié. Ces hommes, s'ils ont des enfants, ne voudraient sans doute pas de ces théories pour eux-mêmes ; mais leurs idées n'en sont pas moins accueillies et propagées dans la société, au grand détriment du bien public.
Pour vous, mes frères, vous résisterez à ces utopies, en respectant davantage le lien de la famille, en vous aimant, en vous entraidant les uns les autres et en gardant les traditions d'honneur que vos ancêtres vous ont léguées. Et, pour vous mettre en garde contre toute défaillance, vous vous rappellerez l'exemple fortifiant que, pendant douze années, la famille Gorini a mis sous vos yeux.
Après la famille, la paroisse. La paroisse, d'ailleurs, est une autre famille, une famille agrandie, une famille spirituelle dont les membres sont unis, sinon par les liens du sang, au moins par ceux de la grâce et de la religion.
C'est là, dans ce nouveau milieu familial que s'achève la formation de l'enfant et qu'il acquiert les vertus surnaturelles. Il y entre par le baptême qui dépose en son âme, avec le germe de toutes ces vertus, la grâce sanctifiante, cette communication de la vie même de Dieu, en sorte que Dieu est notre Père et que nous sommes ses enfants.
Et voyez combien la paroisse est à l'image de la famille ! Une fois, chaque semaine, le jour du Seigneur, les fidèles accourent au son des cloches et se réunissent dans le temple, autour du prêtre qui tient la place de Dieu. Là, ils s’agenouillent ; ils invoquent leur Père qui est dans les cieux, leur Père qui, par un miracle de son amour, réside aussi dans le tabernacle. Là, ils prennent part au sacrifice et peuvent venir s'asseoir à la table du festin. Là, ils reçoivent les instructions et les exhortations de leur pasteur, afin de parvenir au salut.
Un père de paroisse
Et quand, le reste de la semaine, la famille est dispersée à travers les maisons ou dans les champs, elle ne cesse pas d'être unie par la pensée et par le cœur ; chaque membre, au moment où la cloche retentit peut murmurer une prière et s'unir·à tous les fidèles. Oui, la paroisse est une famille, l'image de la grande famille des Bienheureux dans le Ciel.
- Gorini, durant ses trente années de ministère, considéra toujours sa paroisse comme une famille dont il était le père. Son cœur, si débordant quand il s'agissait du foyer domestique, ne pouvait pas être froid, quand il s'agissait de ce foyer d'amour divin qui s'appelle la paroisse. Il était vraiment le bon pasteur, fidèle à tous ses devoirs et dépensant, goutte à goutte, sa vie pour ses ouailles. Quand leurs intérêts spirituels étaient en jeu, il n'hésitait pas à faire le sacrifice de ses chères études.
A La Tranclière, on l'avait vu s'égarer dans les bois, durant la nuit, en portant à un malade les secours de la religion. A Saint-Denis, il trouva le moyen de tout concilier : appelé, un jour, près d'une malade qui avait perdu subitement connaissance, il s'installa près d'elle, avec ses livres, épiant le moment où l'éveil de la connaissance lui permettrait de donner l'absolution.
Voilà quel était le dévouement de M Gorini dans l'accomplissement de son ministère de charité. Mais, là où il a été vraiment maitre, c'est dans les soins qu'il prenait de bien instruire ses paroissiens des vérités de la religion. Cet homme si savant parlait avec une admirable simplicité. II n'y réussit pas, il est vrai, du premier coup ; mais l'adaptation à son auditoire fut assez rapide et les gens de La Tranclière ne tardèrent pas à trouver qu'il avait joliment pris de l'esprit depuis qu'il était au milieu d'eux.
Le fait est qu'il avait acquis un don merveilleux de mettre à la portée des plus ignorants les doctrines les plus élevées, les plus abstraites et les plus difficiles de notre foi. On le vit bien, un jour que Mgr Chalandon était venu donner la confirmation à Saint-Denis. L'évêque, afin de dissiper des accusations qui pesaient sur la négligence du curé, voulut que les enfants fussent interrogés sans indulgence et sur les questions les plus hautes de la théologie. Les réponses furent on ne peut plus satisfaisantes et le vicaire général s'écria, dans son admiration : « Eh bien ! Monseigneur, que vous en semble ? Pour moi, je n'hésite pas à affirmer qu'il n'y a pas de curé dans le diocèse qui instruise mieux que le curé de Saint-Denis. »
Cette fidélité de M. Gorini à ses devoirs de prêtre lui avait attiré l'estime de tous. Entre le pasteur et les ouailles s'étaient formés les liens d'une mutuelle affection qui faisait réellement de la paroisse de Saint-Denis une grande famille. Aussi, ce ne fut pas sans déchirement que M. Gorini prit son parti de la quitter. « Ses adieux, dit son historien, furent touchants et empreints des plus admirables sentiments de tendresse et d'humilité. Il prit à témoin l'autel, calvaire du divin sacrifice, le confessionnal, tribunal du repentir et, la pénitence, la chaire, Sinaï de la parole divine, les fonts baptismaux, fontaine de la régénération, qu'il n'avait jamais recherché que le bien des âmes, et demanda pardon, avec des larmes abondantes, des fautes qu'il avait pu commettre dans l'exercice d'un ministère redoutable et difficile à porter, mème aux épaules des anges. Tous pleuraient. »
Conserver l'esprit de paroisse
Voilà bien, mes frères, une scène de famille. Il était bon de la faire revivre sous vos yeux, afin de vous encourager à aimer votre paroisse, à conserver parmi vous l'esprit de paroisse. La paroisse ! C'est encore une force sociale que les ennemis de notre foi voudraient dissoudre. Quels efforts ne font-ils pas, de nos jours, pour attirer les chrétiens dans leurs fêtes mondaines aux joies empoisonnées et pour les détourner de l'église où se tient la vraie réunion de famille. Dans bon nombre de villages, ils n'y ont que trop réussi. Heureusement, il n'en est pas ainsi du vôtre et, en vous voyant si nombreux, j'ai l'espoir qu'il n'en sera jamais ainsi. Serrez donc vos rangs, mes chers frères, serrez vos rangs autour du clocher natal, autour de l'autel, centre de votre religion. Ne vous laissez point entamer par les principes dissolvants. Avec les traditions d'honneur de la famille, gardez les traditions de foi de la paroisse, afin que vous soyez toujours dignes de celui qui fut votre pasteur et qui là-haut veille encore sur vous, en attendant que vous alliez, à votre tour, partager sa récompense.
Il nous reste à parler de l'amour de M. Gorini pour la science. La science ! Mot magique dont on a, de nos jours, tant abusé! ·Que d'attentats contre notre foi chrétienne se commettent au nom de la science ! Au dire de quelques-uns, notre foi, qu'ils qualifient de préjugé et de superstition, est destinée à disparaître devant les lumières de la science. Est-ce donc, mes frères, qu'il faille se défier de la science ? Non, à côté de cette science orgueilleuse qui se pose en antagoniste de notre foi, et dont les prétentions sont loin d'être fondées, il en existe une autre qui se réclame de la raison, tout comme la première, et qui pourtant vit à côté de la religion en parfaite harmonie.
Cette science est celle que M. Gorini a aimée, celle dont il a été un des plus illustres représentants, celle au nom de laquelle il s'est dressé à son tour contre la fausse science pour la confondre.
Plusieurs historiens du XXe siècle, Guizot, Augustin Thierry, Ampère, Quinet et autres, hommes d'une grande érudition et la gloire de l'enseignement universitaire, avaient osé attaquer l'Eglise en quelques endroits de leurs écrits. A les croire, la science historique dont ils se croyaient les uniques représentants ruinait le dogme et les institutions du catholicisme.
Qui se leva pour répondre à ces attaques ? Le curé de La Tranclière et de Saint-Denis. Eux, avaient à leur disposition les magnifiques bibliothèques et les riches collections de la capitale ; lui, n'avait que quelques livres achetés avec ses maigres économies ou apportés, sur son dos, des bibliothèques de Bourg. Et pourtant, votre curé démontra à tous ces grands savants qu'ils s'étaient trompés, qu'ils avaient été injustes à l'égard de l'Eglise et que la véritable science n'était pas de leur côté.
Ah ! la science, M. Gorini savait bien ce qu'il faut en penser, lui qui, pour l'acquérir, travailla le jour et la nuit, jusqu'à son dernier souffle ! Il était déjà aux portes du tombeau, quand, d'une main défaillante, il faisait les dernières corrections de son immortel ouvrage, la Défense de l'Eglise. Lorsque ce travail fut terminé, il s'endormit pour toujours. Cette vie, trop courte, s'était consumée, comme un holocauste à la science.
Donc, mes frères, pour savoir ce qu'il faut penser de la science, nous pouvons nous en rapporter à M. Gorini. Eh bien ! Savez-vous la science qu'il mettait au-dessus de toutes, au-dessus même des sciences historiques auxquelles il avait consacré sa vie ? C'est la science de Dieu, la science de Jésus-Christ, la science du saint, la science qui mène à la vie éternelle. En cela, il imitait saint Paul qui ne voulait connaître que Jésus crucifié, et il se conformait au précepte du divin Maître : << Vous connaître, vous, le seul Dieu véritable, et celui que vous avez envoyé, Jésus-Christ, voilà la vie éternelle 2.
Le catéchisme est une vraie science
Un jour de première communion à Saint-Denis, M. Gorini disait à ses enfants ; réunis autour de lui : « Mes enfants, aimeriez-vous à voir une grande bibliothèque, aux rayons tout couverts de beaux livres ? - Oh! oui, monsieur le curé, répliquèrent les enfants. - Eh bien ! dit l'abbé Gorini, quand vous la verrez, dites-vous que vous avez entre les mains un livre qui contient plus de vérité, plus de science que tous les livres de cette bibliothèque. - Et comme la jeune troupe manifestait son étonnement, il ajouta, à la surprise de tous : « Ce livre, mes enfants, c'est votre catéchisme »
Ainsi, votre ancien curé, un des plus grands savants du XXe siècle mettait au-dessus de toutes les sciences la science de la religion. Il avait raison ; seule la science religieuse m'apprend le secret de mes destinées et le sens de ma vie. Que m'importe de savoir plus ou moins d'arithmétique, de grammaire, d'histoire ou de philosophie, si je ne sais pas d’où je viens, où je vais et ce que je dois faire ? Cela, la religion me l'apprend et du mème coup me donne les moyens de parvenir au bonheur.
N'est-ce pas, mes frères, ce que vous avez voulu proclamer à votre tour en érigeant à M. Gorini ce monument de votre reconnaissance ? Ce que vous avez voulu glorifier, ce n'est pas seulement l'homme au cœur d'or, le prêtre fidèle à tous ses devoirs, mais aussi le savant chrétien. Qu'il me soit permis de vous en remercier. Merci d'abord à monsieur le curé, à qui nous devons cette intelligente initiative et qui a mené cette affaire à si bonne fin. Merci à toutes les personnes qui, par leur obole petite ou grande, ont contribué à l'érection de ce marbre commémoratif. Merci à vous tous, mes frères, qui, par votre présence, apportez à cette œuvre l'appui de votre approbation.
Et si maintenant, je tourne mes regards vers l'avenir, je vois avec bonheur ce monument de marbre, traverser sans doute bien des siècles et redire la gloire de M. Gorini à vous ses enfants, à vos petits-enfants à toutes les générations qui se succéderont dans cette chrétienne paroisse. Chaque fois que la famille paroissiale se rassemblera dans le saint lieu, elle aura ainsi devant les yeux les grandes leçons de cette vie sacerdotale dont nous venons d'esquisser quelques traits. Alors, je voudrais que cette froide matière s'animât, qu'elle prit une voix et répétât sans cesse : « Aimez votre famille, aimez votre paroisse, aimez votre religion; en un mot : aimez Dieu et restez chrétiens. »
Statut de la Société Gorini parus dans le Bulletin N°1 - 1904
Sous le nom de Société Gorini et sous le patronage du savant curé de La Tranclière,et de Saint-Denis est fondée à Bourg une association pour l’étude de l’histoire et de l’archéologie religieuses du diocèse de Belley.
Elle s’occupera d’abord de l’histoire religieuse de la région qui forme aujourd’hui le diocèse de Belley soit par des travaux d’intérêt général, soit par des monographies paroissiales ou autres.
Elle s’occupera en second lieu de l’archéologie religieuse du diocèse, c’est-à-dire des églises et autres monuments religieux avec leur style, leurs objets d’arts leurs inscriptions.
Pour rester digne de son nom, la Société Gorini ne s’interdira pas les travaux historiques d’un ordre plus général, comme ceux par exemple qui ont illustré l’auteur de la défense de l’Eglise.
Elle devra s’interdire les études purement scientifiques, littéraires, politiques, qui n’auraient aucun lien avec les questions religieuses.
Outre les compositions originales sur tel ou tel point d’histoire et d’archéologie, la Société acceptera avec reconnaissance tous les documents qu’on voudra bien lui présenter.